Ces deux dernières semaines avaient filé dans une sorte de brouillard constant. L’automne commençait à laisser place à l’hiver et l’atmosphère en était changée. L’attaque des centaures avaient laissé des marques. La directrice était suspendue, la Grande Salle avait été fermée pendant quelques jours le temps de tout remettre en place. Certains élèves étaient rentrés dans leur famille le week-end qui avait suivi l’attaque, les parents ayant besoin d’être rassurés. Mais le lundi, les cours avaient repris et la routine s’était réinstallée aussi vite qu’elle n’avait été brisée. Le professeur Terpman était tellement occupée par ses nouvelles responsabilités que Seamus se retrouvait régulièrement seul pour assurer les cours. C’était plutôt stressant, surtout quand les premières années trop téméraires s’approchaient un peu trop des salamandres.
Depuis Halloween, il n’avait que très peu vu ses amis. Sam lui avait raconté ce qui s’était déroulé dans la Grande Salle et après. Le cerveau d’Allen avait freezé et il avait failli tuer Evens. Il avait aussi menacé Eli puis s’était enfui dans la forêt avant de tomber sur Aamos et Vladimir qui l’avait taillé en pièces. Sam affirmait que son corps avait disparu, les deux leaders de l’alliance l’avait cherché partout, sans succès. Il était donc possible qu’il ne soit pas mort mais personne ne s’attendait à ce qu’il revienne.
Eli était aux abonnés absents. Elle ne venait plus manger dans la Grande Salle avec lui. Elle faisait ses heures à l’infirmerie puis restait dans ses appartements. Seamus était venu frapper à sa porte à quelque reprises pour prendre de ses nouvelles mais elle n’ouvrait jamais. Pourtant aujourd’hui, c’est à sa porte, qu’elle vint frapper.
Toc ! Toc ! Toc !
Seamus releva la tête de ses copies. Il avait des dizaines de parchemins à corriger et il n’avançait pas. Son esprit ressassait sans cesse les évènements de ces derniers jours. Il soupira, se leva et entrouvrit la porte, surpris par cette visite tardive. Quand son regard se posait sur la louve, son visage entier s’illumina. Il était sincèrement heureux de la voir. Elle lui avait manqué. Il allait l’inviter à entrer quand il remarqua quelque chose dans ses yeux. Non seulement ils étaient humides, mais ils le fixaient avec une intensité anormale. Il avait l’impression de passer sous un scanner, mais que faisait-elle donc ?
« Il faut qu’on parle ! »
Second soulèvement de sourcil. Il ouvrit la porte plus largement et lui fit signe de rentrer. Elle s’assit directement sur le lit comme elle l’avait fait des dizaines de fois ces derniers mois. Seamus prit place sur sa chaise de bureau, en face d’elle.
Bon c’était normal qu’elle ne soit pas dans son assiette avec tout ce qu’il s’était passé mais il sentait une sorte de détermination dans le ton de la jeune femme. Comme si elle venait mettre les choses au point. L’espace d’un instant, il pensa qu’elle était peut être au courant pour sa nuit avec Victoire et qu’elle lui en voulait. Mais c’était peu probable. Elle ne le voyait pas comme ça. Elle était avec Henry, il l’avait bien compris. Mais peut-être qu’après tous ces événements, ses sentiments pour le serpentard avait changé ?
* Ne tire pas des plans sur la comète, McGregor et écoute ce qu’elle a à te dire ! *
Eli luttait férocement contre ses larmes. Cela faisait vraiment de la peine à voir. Il détestait cette situation. Milles questions se bousculaient dans sa tête. Que venait-elle lui annoncer ? Allait-elle parler de la perte d’Henry ? Etait-ce ça qui la détruisait à ce point ? Il la savait amoureuse mais pas à ce point… Enfin qui était-il pour juger ? Peut-être était-il vraiment mort. Elle avait le droit de le pleurer. Peu importe l’abruti que c’était.
Elle le fixait intensément, perdue dans ses propres pensées. Ces secondes lui parurent durer des heures. Seamus promena son regard sur son visage comme jamais il ne s’était permis de le faire avant. Ses longs cheveux marrons encadrant délicatement son visage, ses pommettes rondes lui donnant toujours un air joueur, ses yeux brillants, profonds, emprunt de sagesse, de secrets, de douleur mais surtout d’amour et de bonté, ses lèvres généreuses, roses et incroyablement désirables.
Soudain, elle ouvrit la bouche sans qu’un son ne puisse sortir, elle souffrait intensément. Il n’en pouvait plus, il aurait fait n’importe quoi pour soulager sa peine. Même si c’était ressusciter Henry ! N’importe quoi !
« Je vais partir. Je rentre au pays. »
La mâchoire de Seamus se décrocha sous la surprise. Il s’était attendu à tout, sauf à ça.
« Quoi ? Hors de question ! » Son ton le surpris lui-même. C’était un ordre, elle ne pouvait pas partir. Il se racla la gorge, se leva de sa chaise et vint s’asseoir sur le lit à ses côtés. Sans vraiment y réfléchir, il attrapa la main de la jeune femme et la serra dans la sienne, plongeant son regard azur dans le sien. Elle ne pouvait pas partir, elle ne pouvait pas le laisser ici. Elle comptait trop pour lui. C’était son amie, une des seules. Il avait besoin d’elle et il sentait qu’elle avait besoin de lui. En sa présence, elle avait presque oublié Henry lors de son admission à Ste Mangouste en septembre. Il ne voulait pas avoir la prétention de dire qu’il pourrait lui faire oublier Allen mais il pouvait au moins rendre cette séparation moins douloureuse.
Il pensa brièvement à Ludwig et Valdemar qu’il avait rencontrés à la tête de Sanglier quelques semaines auparavant. Peut-être que c’était d’eux qu’elle avait besoin en fin de compte. Seamus, avec toute la bonne volonté du monde, ne lui suffisait peut être pas pour cette épreuve. C’était eux sa famille, pas lui. Son coeur se serra en constatant qu’une part de lui avait désespérément envie d’en faire partie.
« Pourquoi ? »
Il avait besoin de plus. Il voulait comprendre. Qu’elle pose des mots sur ce qu’ils étaient et pourquoi elle le quittait. Il en avait marre de dire au revoir.
Elle était au bord du gouffre. Son regard vacillait dans la pièce cherchant vainement une chose à laquelle se raccrocher pour s’empêcher de tomber. Enfin, ses yeux se plongèrent dans ceux du garde-chasse. Il aurait tout donner pour savoir à quoi elle pensait. Qu’est-ce qui la rendait si fébrile et la faisait trembler ? Il n’avait jamais vu une douleur aussi vive. Visiblement, les yeux de Seamus n’étaient pas la bouée qu’elle cherchait désespérément, elle craqua aussi violemment que lorsqu’elle prenait son corps de louve. Elle vint se loger dans ses bras alors que son corps se soulevait au rythme des sanglots. C’était la première fois qu’ils étaient si proches. Le coeur du jeune homme s’accéléra. Il se surprit à apprécier cette sensation dans toute l’ironie de la situation. Il aimait la sentir contre lui, sentir qu’il pouvait l’apaiser, qu’elle avait besoin de lui. Il passa ses doigts dans ses cheveux, silencieusement. Il n’y avait pas de formule adéquate à ce moment. Il ne pouvait pas lui promettre que tout rentrerait dans l’ordre, que tout se passerait bien. Il ne pouvait pas lui promettre qu’elle oublierait sa peine. La seule promesse qu’il pouvait tenir était celle de sa présence pour elle. Il serait toujours là, à ses côtés.
En quelques minutes, les soubresauts se firent moins réguliers, ses pleurs moins soutenus, ses sanglots moins bruyants. Le calme et le silence reprirent le dessus. Elle leva ses yeux rouges vers lui. Elle restait incroyablement belle.
Soudain, Seamus retint sa respiration. Elle était proche, trop proche. Aussi agréable que cela puisse être, c’était dangereux. Il savait ce qu’il ressentait pour la scandinave. Il ne pouvait pas vraiment poser un mot là-dessus, comme souvent, mais il savait qu’il avait envie d’elle. Il aimait tout chez elle, il était bien en sa présence, il était lui-même. Elle faisait ressortir le meilleur de lui. Et quand on aime autant quelqu’un, on ne peut pas résister à l’envie d’être proche. Il n’y a plus de limites, on ne veut faire qu’un avec cette personne. Il s’était toujours retenu, il ne voulait pas briser leur amitié en perdant le contrôle. Mais là… Là, elle ne l’aidait pas. Elle était trop proche. Beaucoup. Trop. Proche.
Et elle se rapprochait encore, comme si c’était possible. Il aurait peut-être du la repousser, elle n’était pas en état. Elle n’avait peut-être pas conscience de ce qu’elle faisait. Elle le regretterait peut-être demain. Mais il n’y arrivait pas. Il sentait le souffle de la jeune femme sur ses lèvres, elle les frôlaient. Il ne bougeait pas. Il gardait un contrôle incertain, dans un équilibre fragile entre l’envie de lui sauter dessus et celle de préserver leur relation, de la repousser. Il ne pouvait se retenir plus longtemps, elle devait faire un choix, cette tension était insoutenable. Il devait faire ou dire quelque chose. Il entrouvrit ses lèvres avec toutes les peines du monde, il allait lui dire d’arrêter, il allait lui dire que ce n’était pas une bonne idée. Mais alors que le mot Stop lui brulait les lèvres, Elizabeth fondit sur lui et cloua sur place toutes ses bonnes intentions. Il ne pouvait pas rester loin d’elle, il la voulait et elle venait d’ouvrir la porte.
Leur baiser était sauvage, fougueux. Il était aussi salé des nombreuses larmes qu’elle avait versées. Il voulait lui faire oublier. Ses mains glissèrent sur son corps resté pendant bien trop longtemps terre interdite. Il la serrait contre lui appréciant la chaleur de son corps contre le sien. Il en avait souvent rêvé et la réalité était encore meilleure. Il glissa sa main sous son haut, appréciant chaque centimètre de sa peau sous le contact de ses doigts. Une partie de lui lui criait d’en profiter. Cette étreinte était éphémère, il le sentait au plus profond de son être mais il refusait de l’admettre. Ca ne pouvait pas être des adieux, ça devait être le début de quelque chose, pas la fin, c’était hors de question.
Alors que les doigts glissaient sur sa cuisse et qu’il s’affairait à se débarrasser des couches de tissus superflues, il la sentit se raidir. Il comprit tout de suite qu’elle revenait à la raison et que ce baiser avait été une erreur de parcours. Elle le rompit et attrapa ses mains pour se détacher de son étreinte. Seamus ressentit directement le froid s’immiscer sur tous les endroits que le contact de sa peau avait brulés. C’était plus dur que jamais. L’ascenseur émotionnel qu’elle venait de lui imposer avait retourné son estomac au point qu’il se sentait soudainement nauséeux. Pas cool Hiilos, pas cool… Il la fixa intensément, essayant de rependre son souffle alors qu’il avait l’impression d’avoir reçu un coup dans l’estomac. Mais ses prochaines paroles eurent l’effet d’un uppercut.
« Je suis enceinte ! »
Deuxième fois que sa mâchoire se décrocha en quelques minutes. Une petite voix dans sa tête essayait de le convaincre qu’il avait mal entendu et qu’il devait terminer ce qu’il avait commencé. Il en allait de sa santé mentale.
Ses sourcils étaient si froncés que l’on voyait à peine ses yeux. Sa bouche s’agitait comme s’il allait dire quelque chose mais aucun son ne sortait. Son esprit dessina Allen et Eli dans les couloirs le jour de la répartition en septembre. C’était évident que ce n’était pas parce qu’il avait mazouté leurs ambitions ce jour-là qu’il les avait empêché à jamais d’avoir des relations. Mais enceinte?! Vraiment ? Apprenti-infirmière et pas capable d’avoir une contraception efficace ! C’était dingue ! Il n’avait lui-même pas remarqué son propre soudain changement d’émotion. Il était en colère. Contre elle, contre lui, contre tout le monde. C’était quoi cette daube ? Qui tombait enceinte à 17 ans?
« Et tu vas le garder ? »
Elle pouvait sentir toute la colère froide de Seamus dans ces quelques mots. Il avait repris son masque de fidèle Serpentard méprisant et insensible. Bien sûr qu’elle allait le garder ! C’était son enfant ! N’importe qui qui connaissait Eli savait qu’elle garderait l’enfant. Le sien, même celui de quelqu’un d’autre si on le lui confiait. Mais ça ne l’empêchait pas d’être paisiblement énervé. Elle venait de l’allumer à mort ! Elle venait de confirmer tout ce qu’il ressentait pour elle, elle venait d’allumer la mèche… Elle ne pouvait pas s’étonner que la bombe explose !
Et puis, il comprit. Il comprit que c’était sa façon de le repousser et de partir en paix. Elle voulait qu’il lui en veuille. Elle voulait qu’il lui hurle dessus et lui ordonne de disparaitre de sa vue. Ce constat l’énerva encore plus. Ca le rendait fou. De ne pas avoir le choix. On l’avait fait pour lui. Il était désormais le mec qui craquait pour la futur maman. Le coin cassé du triangle amoureux, celui qui n’aura jamais ce qu’il veut. Tout ce qu’il allait faire c’était rendre les choses encore plus compliquées qu’elles n’étaient. Et c’était surement ça aussi qu’elle quittait. Les complications supplémentaires.
Elle avait réagi comme il le pensait. Evidemment qu’elle le gardait. Ce n’était certainement même pas une question qu’elle s’était posée. C’était juste le truc le plus horrible qui lui était venu à l’esprit. Et puis, comme si aujourd’hui était un jour comme un autre, comme si elle ne venait pas de lâcher une bombe qui changerait sa vie, leur vie, elle s’allongea sur le lit, jouant avec l’attrape-rêve qu’elle avait un jour attaché là sans raison apparente. S’il n’y avait pas de raison, l’objet avait pourtant gagné une grande signification pour le jeune homme. Une part d’elle était toujours présente avec lui et veillait sur son sommeil.
Comme avec Victoire quelques jours auparavant, Seamus sentit que la jeune femme avait besoin de parler, de mettre des mots sur tout ce qui lui arrivait. Il fixa son dos puis s’appuya contre le mur, à l’opposé du lit par rapport à la jeune femme. Il avait besoin de mettre un peu de distance entre eux après la fougue qui les avait habité quelques instants plus tôt.
Enfin elle brisa le silence. Elle voulait lui donner des détails. Ce qu’il s’était passé, depuis quand elle savait, qui était au courant… Seamus avala les informations avec difficultés. Elle savait depuis des mois. Des semaines, des jours entiers où elle ne lui avait rien dit. Pourquoi maintenant ? Seamus fut néanmoins touché d’être le premier à apprendre la nouvelle. Avant même Henry. Et Sam.
Eli se tourna et lui montra son ventre, plat, parfaitement normal. Un rapide calcul le fit froncer les sourcils. Ce n’était pas normal, du tout. Alors comme ça Crowley l’aidait ? Il n’avait aucune confiance en cet homme. Savoir qu’Eli dépendait complètement de lui le dérangeait fortement.
Il fixait la jeune femme distraitement se demandant ce que tout cela signifiait pour elle. Elle venait de confirmer qu’Henry était toujours de ce monde, il n’avait pas osé lui poser la question clairement. Mais cette information bouscula encore plus ses réflexions. Ils n’étaient plus ensembles ? Qu’est-ce que leur étreinte signifiait pour elle ? Elle en avait envie autant que lui, il l’avait senti, il l’avait senti s’éloigner à regret. Ce n’était pas que physique, elle l’aimait autant que lui l’aimait. Et le plus triste dans tout ça, c’est que ce constat ne le rendit pas plus heureux, au contraire. C’était la merde.
Elle devait rester loin d’Henry pour sa sécurité et celle du petit être qui prenait vie en son sein. C’était lui qu’elle fuyait. Il en venait presque à regretter qu’il ne soit pas le père de l’enfant. Evidemment, qu’il ne se sentait pas être père à son âge, tout comme il ne voyait pas Eli l’être. Mais cela aurait été plus simple, non ? Savoir que le père de son enfant souhaitait la mort de cet dernier était terrifiant.
Seamus ne voulait pas l’interrompre. Il avait peur de dire quelque chose de travers. De ne pas avoir l’air de respecter ses choix, de ne pas accepter ses erreurs. Mais il se devait de dire ce qu’il ressentait.
« Cette situation est ridicule… Crowley devrait remettre Henry aux autorités. Depuis Azkaban, il ne pourrait rien contre toi… Contre vous… Et tu pourrais rester… Terminer ton stage… » Terminer ce qu’on a commencé… pensa-t-il sans le dire.
Couchée sur le dos, elle risqua un regard vers lui. Le Garde-chasse la fixait toujours, ce qui lui fit détourner ses yeux aussitôt. L’envie n’avait pas disparu. Elle était toujours là, sous-jacente mais néanmoins palpable.
« Je peux rester ? Cette nuit, je peux rester ici ? Avec toi ? »
Décrochage de mâchoire, troisième prise ! Décidément, cette fille était vraiment pleine de surprises. C’était dangereux, il savait que ça allait déraper. Il ne pourrait pas dormir à ses côtés sans remettre le couvert. Leur baiser brûlant interrompu l’avait frustré. Il en voulait plus et il savait que la barrière qu’elle leur imposait allait finir par briser. Surtout si elle restait toute la nuit.
Elle s’approcha à nouveau, passa ses doigts sur sa joue, dessinant sa machoire puis attrapa sa main. Le désir de Seamus se réveilla aussitôt. Elle n’allait pas changer d’avis. Il le comprenait maintenant, elle ne reviendrait pas sur sa décision, aussi stupide et incompréhensible pour lui soit-elle. Elle le quittait. Elle le quittait mais elle voulait quand même être sienne. Le temps d’une nuit. C’était tout ce qu’elle avait à offrir. Une nuit où rien n’existerait, qu’eux deux.
Il détourna son regard du sien, évaluant la situation. Une guerre interne se déroulait. Tout en lui avait envie de vivre cette aventure, il la voulait elle, entière. Mais sa raison lui criait de ne pas prendre ce chemin risqué dont il risquait de ne pas revenir. Se promettre l’amour pour une nuit puis faire comme si ça n’avait jamais existé le lendemain. La laisser partir. Elle allait le rendre accro. Il en voudrait toujours plus. Il n’arriverait pas à la laisser le quitter.
Il finit par reporter son regard sur elle, sur ses yeux brûlants. Oh god, il ne pouvait rien lui refuser. Il était pris dans sa toile. L’avant-goût qu’elle lui avait laissé apercevoir promettait une passion qu’il n’avait peut être jamais vécue. Alors, lentement, il posa une main sur la joue de la jeune femme et s’empara à nouveau de ses lèvres. L’instant d’après, il se trouvait allongé sur elle, ses mains récupérant ce contact avec sa peau qui lui avait manqué.
Leur étreinte était à la fois douce et sauvage. Il était pris dans le tourbillon et n’arrivait plus à émerger. Il ne pensait plus à rien, qu’à elle, qu’à eux, à ses mains sur sa peau brûlante et ses lèvres irrésistibles. Il ne savait plus où ils étaient, il avait oublié tout ce qu’elle lui avait avoué quelques instants plus tôt. Sa grossesse, son départ… Pourtant, quelque chose en lui hurlait de profiter du moment, qu’il ne se reproduirait plus, que c’était exceptionnel.
Pour la première fois depuis leur rencontre, Seamus sentait que ses sentiments étaient réciproques. Leurs moindres gestes traduisaient l’attirance et l’amour qu’ils avaient l’un pour l’autre. Il n’était plus invisible à ses yeux. Pour la première fois, il n’y avait plus la barrière que représentait Allen. Cela conforta son idée que si le Serpentard n’avait jamais existé, cette nuit n’aurait pas été unique.
Ce n’est que lors que la respiration de jeune femme se ralentit et qu’il devina qu’elle venait de sombrer dans le sommeil qu’il récupéra ses capacités intellectuelles. Il venait de faire l’amour avec une femme enceinte… deux fois… Enfin, elle n’était pas enceinte deux fois, vous avez compris ! Quoi que ? On ne peut quand même pas tomber deux fois enceinte ?! Seamus secoua la tête pour atterrir. Elle allait partir, quoi qu’il venait de se passer, elle le quittait. Il n’avait toujours pas vraiment compris pourquoi à vrai dire. Ok, il y avait Ludwig et Valdemar là-bas… Mais il y avait Samuel et Seamus ici… Son stage, sa future carrière… Le jeune homme réalisa que continuer son stage alors qu’on est enceinte jusqu’au cou n’était peut-être pas conseillé…
Il poussa un soupire et caressa distraitement du bout des doigts la peau douce de la louve. Il n’y avait pas de solution. Cette nuit c’était juste sa façon de lui dire au revoir. C’était un genre de cadeau ? Il grimaça en imaginant qu’elle s’était forcé à l’aimer juste pour le remercier de sa présence à ses côtés ces derniers mois. Mais il savait que ce n’était pas la vérité. Une part de lui voulait juste lui en vouloir. C’était plus facile de haïr ceux qu’on aime que de supporter leur absence, c’était déjà ce qu’il avait fait avec Victoire, non ? L’histoire se répétait pitoyablement.
Seamus sombra à son tour dans les bras de morphée, la tête pleine de raison d’haïr Elisabeth Hiilos…
L’apprenti garde-chasse sentit la jolie brune qui partageait son lit s’agiter dans son sommeil. L’instant d’après, elle ouvrait les yeux, presque qu’en sursaut. Seamus la dévisageait. Soit elle venait de réaliser avec horreur ce qu’ils avaient fait cette nuit et regrettait du plus profond de son âme, soit elle venait de rêver qu’elle avait loupé le Poudlard Express… Et comme elle n’étudiait pas ici et qu’elle n’avait donc jamais connu l’angoisse de rater le merveilleux train de la voie 9 3/4, c’était forcément la première solution.
Cependant, elle se pencha vers lui pour déposer un baiser sur ses lèvres closes. Bon, c’était pas si terrible que ça finalement. Il répondit à son baiser avec un sourire au coin des lèvres, bien que celui-ci était voilé par le fait que c’était peut être le dernier qu’ils échangeaient.
« Bonjour charmante créature ! »
Il vit dans ses yeux l’instant de panique qui pointait son nez au lendemain d’une nuit a priori prévue sans lendemain. Que faire, que dire, comment se barrer sans être impolie ? Il sentit un noeud se former dans son ventre. Elle proposa toutefois de l’accompagner dans ses tâches de garde-chasse intérimaire. Kirsten avait disparue depuis la révolte des centaures et personne ne lui disait quand celle-ci allait revenir et si cette disparition était consentante ou si elle relevait plutôt du kidnapping… Ce n’était pas une mauvaise idée qu’elle l’accompagne. Elle le faisait parfois avant… avant tout ce merdier !
Seamus la regarda se glisser gracieusement hors du lit, en tenue d’Eve. Il ne put s’empêcher de la dévorer des yeux. Sa longue crinière qui tombait en cascade dans son dos, ses courbes généreuses et irrésistibles, son ventre rond… SON VENTRE ROND ? Le jeune homme eut un haut-le-coeur en la voyant se figer devant la glace. Elle était enceinte… genre bien enceinte ! Rien à voir avec hier soir ! L’implication de Crowley lui revint en tête. Il avait camouflé ce « détail ». Il eut des frissons sur tout le corps, réalisant pleinement la situation dans laquelle ils se trouvaient. Soudainement, Eli se plia en deux et fonça vers la salle de bain. Seamus se leva aussitôt, attrapant un caleçon au passage et s’approcha de la porte. Les bruits qui s’échappaient ne laissaient aucun doute. Nausées matinales. Nouveau haut-le-coeur pour l’ex-Serpentard. Il attrapa sa baguette pour insonoriser la pièce, il voulait respecter son intimité…
Seamus en profita pour s’habiller distraitement en enfilant un jean noir et une chemise de la même teinte. Puis il attrapa un parchemin et une plume qui trainait sur son bureau et écrivit quelques mots. D’un coup de baguette, le papier prit vie et glissa sous la porte direction les cuisines. Quelques instants plus tard, un elfe de maison apparut portant sur sa tête en équilibre précaire différents plateaux recouverts de cloches. Le garde-chasse le remercia après qu’il ait déposé le petit déjeuner sur le bureau et celui-ci disparut.
Le jeune homme se retourna vers la salle de bain en entendant la porte se rouvrir sur une Eli toute propre, vêtue d’une de ses chemises qui lui allait très bien, les joues roses de gêne et… les cheveux courts ? Il écarquilla les yeux de surprise puis un sourire franc naquit sur son visage alors qu’il se rapprochait d’elle qui lui conseillait de changer de brosse à dent. Il éclata d’un rire clair.
« Pas de problème, je crois que j’en ai une qui traine quelque part… » Il marqua une pause et passa ses doigts dans ses cheveux fraichement coupés. « C’est très sophistiqué Miss Hiilos ! » avoua-t-il en déposant un baiser sur son front. Comment avait-elle fait pour le rendre si fleur bleue ? Lui qui avait horreur des marques d’affection, des histoires de coeur, qui considérait l’amour comme une perte de temps et une faiblesse dont il ne voulait pas s’affubler. Si Dean était là, il lèverait les yeux au ciel d’exaspération devant le romantisme à l’eau de rose de son ainé. D’abord Vic, puis Eli… Il n’avait jamais voulu s’encombrer de petite copine jusqu’à présent et voilà qu’en un an, il était tombé amoureux deux fois, de deux filles diamétralement opposées et qui avaient toutes les deux fini par lui briser le coeur. Seamus imaginait déjà son frère lui faire la leçon avec son tact inimitable « Ferme ton coeur et ouvre ta braguette ! Tu sais combien de gonzesses à Poudlard rêvent de se taper l’apprenti garde-chasse ? Beaucoup trop ! Fonce mon grand ! Et pas deux fois la même hein ! Je t’ai à l’oeil ! »
Seamus s’éloigna de la jeune femme pour lui désigner les plateaux en argent qui trônaient sur le bureau et dont émanait une douce odeur de bacon. « Je t’ai préparé un déjeuner de la mort » annonça-t-il avec un clin d’oeil. « Je sais que tu dois êtes un peu barbouillée mais force toi… Tu manges pour deux maintenant… » Et en se dirigeant vers la salle de bain pour se laver les dents à son tour, il réalisa qu’il aimait la petite chose qui grouillait dans le ventre d’Eli presqu’autant qu’il aimait sa mère.
La réaction d’Eli fasse au petit déjeuner apporté par l’elfe de maison lui arracha un sourire. Elle devina tout de suite le contenu. Elle arrivait même à blaguer sur sa condition de loup-garou. Elle était fascinante. Seamus s’installa à ses côtés et piqua distraitement quelques bouchées d’omelette. Il n’avait pas vraiment faim, son estomac était noué depuis toutes les révélations que la jeune femme lui avait faite. Régulièrement, son regard errait vers son ventre rond. Il ne pouvait s’empêcher d’imaginer un petit Henry en position foetale qui le dévisageait depuis l’intérieur du ventre de sa mère. C’était vraiment déstabilisant. Le silence s’installa doucement, l’ambiance était à nouveau un peu tendue. Ces dernières heures n’avaient été qu’une montagne russe d’émotions. Ils vacillaient entre le désir, la rigolade, la déception, le désespoir… Seamus ne pouvait pas s’empêcher de penser que c’étaient leurs derniers moments ensemble. Elle allait le quitter, c’était inévitable, il fouillait son esprit à la recherche d’arguments pour la garde auprès de lui mais il n’y parvenait plus. Et dès qu’il l’imaginait franchir cette porte pour la dernière fois, son coeur s’emballait et tout l’amour qui lui portait se transformait en haine. Oui, il lui en voulait de lui avait laissé entrevoir ce qu’aurait été une vie avec elle. Il lui en voulait de l’aimer et d’être aimé en retour.
Comme si elle lisait dans ses pensées, elle s’approcha de lui et s’empara de ses lèvres une nouvelle fois. Il ne pouvait pas lutter, il aurait peut être dû la repousser mais il n’y arrivait pas. Elle s’éloigna à nouveau et prononça son prénom. Seamus sentit que c’était la fin. Leurs adieux étaient venus. Sa voix tremblait et son regard était fuyant. C’était visiblement aussi dur pour elle que pour lui.
A chaque phrase qu’elle prononçait, Seamus avait le sentiment que quelqu’un lui écrasait un poing dans l’estomac. Il n’avait jamais eu une telle certitude qu’ils étaient réellement passés à côté de quelque chose. Il imaginait, comme elle, tout ce qu’ils auraient pu vivre ensemble si le timing n’avait pas été aussi pourri. Ca faisait mal. Et il lui en voulait de lui mettre ces images en tête. Il ne voulait pas y penser. Il ne voulait pas penser à tout ce qu’ils auraient pu être.
« J’aurais pu tout ça, si seule ma vie était en jeu. Si j'avais fait les bons choix. J'ai jamais su faire les bons choix. Mais si j'avais fais les bons, je ne serais jamais venu à Poudlard, et je ne t'aurais jamais rencontré. Je ne t'aurais jamais embrassé comme ça. Je n'aurais jamais vécu ça. Cette vie n'est plus pour moi, parce que je n'ai jamais su faire les bons choix. »
Seamus devenait fou, il avait l’impression d’être spectateur de toute cette histoire. Il n’avait pas son mot à dire, il ne pouvait que subir ce qu’elle avait décidé. Une fureur sourde grandissait dans son ventre et lui donnait envie d’exploser. Il lui en voulait forcément pour la peine qu’elle lui faisait subir mais aussi pour celle qu’elle s’imposait. Elle avait l’air de souffrir encore plus que lui et il avait l’impression qu’elle se punissait doublement en s’exilant en Scandinavie, en vivant cette nuit à ses côtés… Une fois encore, leurs lèvres se scellèrent dans un ultime baiser que les larmes vinrent saler. Il avait envie de lui demander de rester. Lui dire qu’il ne serait pas heureux sans elle. Qu’il avait besoin d’elle.
« Je ne peux pas te perdre… » Finit-il par lâcher en plongeant son regard dans le sien. Mais elle le fuyait, elle avait dit tout ce qu’elle avait à dire et elle ne reviendrait pas sur sa décision. Il le savait. Il se mordit la lèvre et poussa un grognement rageur.
Il avait toujours eu un contrôle de ses émotions irréprochables. La colère, la douleur, il avait appris à la cadenasser, à la contenir au plus profond de lui pour qu’on ne sache jamais ce à quoi il pensait. Et aujourd’hui, il en avait marre. Marre d’être cette muraille impénétrable, d’être celui qui souffrait en silence sans que ça ne dérange personne. Il en avait assez d’être le seul à porter cette douleur. Son visage se crispa sous la colère et il vit dans le regard d’Eli qu’elle était surprise de le voir dans un état pareil. Rien de ce qu’il dirait ne lui ferait changer d’avis. Sa colère contre lui, contre elle, contre Henry le gagna tout entier. Il ne pouvait plus la contenir. Elle explosait.
Sans vraiment comprendre ce qu’il faisait, il abattit son poing contre le mur en pierre. La douleur physique était bien plus gérable que la douleur psychologique. L’espace d’un instant, il se sentit soulagé. Puis réalisant son geste et le crissement des nerfs qui remontaient tout le long de son bras, il regretta son geste. Merde mais qu’est-ce qu’il foutait ? Ca ne lui ressemblait pas du tout ! Eli le fixait avec des yeux ronds, inquiète, surprise, désemparée ?
« Je t’en veux de t’aimer ! » répondit-il à ses interrogations muettes. « Il faut que tu partes maintenant… On ne fait que repousser l’inévitable et ce n’est pas comme si j’avais le choix dans cette histoire ! »
Il regretta ses paroles à peine les avoir prononcée. Non, il ne voulait pas qu’elle parte mais il l’aimait un peu plus à chaque seconde qui passait et ça ne faisait que rendre les choses plus difficiles.